Quelques infos:
Edition: Pocket
Date de 1ère parution: 1998
Pages: 316
Mon avis:
Nous sommes en 1939. L'Allemagne vient d'envahir la Pologne et Varsovie tombe aux mains des soldats nazis. La famille Szpilman est une famille de musicien. Un des fils, Wladyslaw, est un pianiste reconnu. Mais ils sont juifs. Rapidement, ils se retrouvent enfermés dans le ghetto où ils voient leurs libertés se réduire comme peau de chagrin et où ils subissent les exactions de soldats allemands et de policiers juifs collabos. En 1942, la famille est emmenée pour être conduite jusqu'au
camp de Treblinka. Au moment de monter dans le train, un policier le reconnaît, l'attrape et le sort de la foule in extremis malgré ses protestations. Commencent alors de longs mois d'errance dans les rues de Varsovie dévastées où luttant contre le froid et la faim, Wladyslaw se battra pour échapper au sort qu'auront connu sa famille et des millions de coreligionnaires.
Voilà un témoignage poignant sur la vie dans le ghetto de Varsovie. Je m'étais attendue à une lecture rude, je n'ai pas été déçue!
Ecrit juste après la guerre, l'auteur est encore sous le coup de ce qu'il a vécu. Il expose les faits dans un style concis sans s’apitoyer sur son sort ou sans écrire des pages et des pages sur les horreurs auxquelles il a assisté. On le sent sidéré parce qu'il voit. Les exécutions sommaires, les enfants abattus froidement, les vieux défenestrés, les humiliations.... Rien ne lui a été épargné!
Certains passages m'ont bouleversée, notamment lors de l'évacuation d'un orphelinat où un brave médecin accompagne les enfants vers le train en leur faisant croire "qu'il s'agissait d'une excursion à la campagne, qu'ils allaient enfin sortir des murs étouffants du ghetto pour découvrir des prairies en fleurs, des ruisseaux où ils pourraient se baigner, des bois remplis de groseilles et de champignons... Il leur avait recommandé de revêtir leurs plus beaux habits, et c'est ainsi qu'ils sont apparus sous mes yeux, deux par deux, bien habillés et le cœur en fête. La petite colonne était emmenée par un SS qui en bon allemand, aimait les enfants, même ceux qu'il conduisait dans l'autre monde. Il avait été particulièrement charmé par un garçon d'une douzaine d'années, un jeune violoniste qui avait pris son instrument sous le bras. Il lui a demandé de se placer en tête de la procession et de jouer des airs entraînants. Et c'est de cette manière qu'ils se sont mis en route."
Enfin un peu d'espoir apparaît lorsque la résistance s'organise et que Wladyslaw trouve un soutien dans la partie aryenne de Varsovie où d'anciennes relations le cachent jusqu'à cette rencontre avec cet officier allemand qui le sauvera. L'espoir devient enfin palpable et accessible.
J'ai été impressionné par sa force vitale. Séparé des siens, alors même qu'il se terre dans les greniers des immeubles détruits, il lutte encore et toujours et veille à préserver ses mains dans l'espoir de retrouver son métier de pianiste à la fin de la guerre.
J'ai aimé la présence de la musique tout au long des pages et cette référence au nocturne en ut dièse mineur de Chopin, qui reste, bien avant que je connaisse l'existence du livre, mon préféré. Ici encore, l'art rapproche les hommes.
Ce témoignage est une extraordinaire leçon de vie et d'histoire que tout le monde devrait lire afin de savoir et de ne pas oublier.
"La vie dans le ghetto était d'autant plus atroce qu'elle gardait les apparences de la liberté, au contraire. Il suffisait de descendre dans la rue pour avoir l'impression trompeuse de se trouver au milieu d'une ville comme les autres. Nous ne prêtions même plus attention à nos brassards de Juifs, puisque nous en portions tous un. (...) Mais les rues du ghetto, et elles seuls, finissaient touts contre un mur. Il m'arrivait souvent de partir en marchant au hasard, sans but précis, et chaque fois j'étais surpris de buter sur l'une de ces barrières. Elles se dressaient là où j'aurais voulu continuer à avancer, m'interdisaient de poursuivre ma route, et il n'y avait aucune raison logique à cela? Soudain, la portion de la rue située de l'autre côté du mur devenait l'endroit le plus chérissable au monde, celui dont l'avais le plus besoin, qui à cet instant précis recelait tout ce que j'aurais désiré voir... Mais le mur restait le plus fort."
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