Affichage des articles dont le libellé est Littérature contemporaine. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Littérature contemporaine. Afficher tous les articles

vendredi 5 juillet 2019

Fille de l'air - Fiona Kidman



Quelques infos:


Édition: Wespieser
Date de parution: 2017
Pages: 480

Mon avis:


Jean Batten est une aviatrice néo-zélandaise qui enchaîna les records dans les années 30 ce qui lui valu une renommée internationale.
Dans cette biographie romancée, on découvre également un pan de l'histoire de l'aviation où les pilotes devenaient des héros à chacun de leurs exploits, les poussant à aller toujours plus vite, toujours plus loin et dont la carrière était souvent abrégée par un crash.

J'ai aimé le portrait de cette femme déterminée, sûre de son talent et de son destin. Elle a du batailler pour réaliser son rêve, à une époque où il était inenvisageable pour une jeune femme de ne pas vouloir se marier. Mais Jean a d'autres aspirations. Elle joue astucieusement de son statut de femme à marier, empruntant de l'argent à ses prétendants pour payer ses heures de vol et assouvir sa passion, soutenue dans son entreprise par une femme, sa mère, Nellie, omniprésente. 

J'ai été un peu frustrée que son voyage Angleterre/Australie dont elle pulvérise le record ne tienne que dans un chapitre. Le livre, finalement, s'intéresse plus au personnage qu'à ses exploits. Néanmoins je me suis passionnée pour l'histoire de cette femme exceptionnelle au destin tragique, qui connut les sommets de la gloire avant de tomber dans l'oubli.



jeudi 20 juin 2019

Les fiancées du Pacifique - Jojo Moyes



Quelques infos:


Édition: Le livre de poche
Date de parution: 2010
Pages: 626

Mon avis:


Nous sommes en 1946, le monde panse ses plaies après la deuxième guerre mondiale. En Australie, des milliers de femmes attendent de pouvoir rejoindre leurs maris anglais, des soldats épousés à la hâte pendant la guerre. Le 2 Juillet, deux cents cinquante cinq d'entre elles sont embarquées dans le porte-avion Victoria pour rejoindre leurs époux. Accompagnées d'un millier de soldats qui raccompagne le valeureux navire à son port d'attache, ces femmes vont traverser le Pacifique, en route pour un nouveau destin.

Après un début un peu poussif (une trentaine de pages, rien d'insurmontable!) où le récit peine à se mettre en place, j'ai vite été captivée par l'histoire de ces femmes qui quittent leur terre natale pour rejoindre un homme qu'elles ont eu peu de temps de connaître et qu'elles ont épousé pendant cette période trouble. Le livre s'attache à nous décrire la vie de quatre d'entre elles: il y a Jean, âgée de 16 ans qui espère trouver en Angleterre une famille aimante, Frances, la mystérieuse, peu bavarde, elle semble cacher un lourd passé, Margaret, enceinte jusqu'au cou et Avice, de la haute société, imbue de sa personne. L'auteur nous dépeint également la vie des soldats à bord, leurs espoirs, leur joie et étonnement leur peur de rentrer au bercail et de retrouver une vie normale après la guerre.
Ces personnages se croisent, se soutiennent, s'évitent, s'attirent, se repoussent.... La traversée n'est pas de tout repos dans cet espace confiné et les caractères se révèlent au rythme des moteurs poussifs du vieux porte-avion.
De cette histoire vraie, Jojo Moyes a su nous raconter une jolie histoire. A chaque début de chapitre, un extrait d'un article, d'un rapport ou d'une lettre témoignent du contexte de l'époque. Les liens qui se créent, amicaux ou amoureux, sont racontés tout en pudeur et en finesse. Le récit se fait parfois ironique, c'est un choc pour ses femmes, parfois frivoles de se mettre aux us et coutumes militaires mais également pour ces hommes qui vont revoir leurs préjugés.
Avant tout, Jojo Moyes met en avant le courage de ces femmes qui vont droit vers l'inconnu, retrouver un homme à peine connu pour une nouvelle vie loin des leurs, un sacré pari sur l'avenir. Après tant de vies bouleversées par la guerre, elles croient au bonheur à l'autre bout du monde.

Une bien jolie histoire très bien racontée!



vendredi 7 juin 2019

Hortense - Jacques Expert



Quelques infos:


Édition: De Noyelles
Date de parution: Juin 2016
Pages: 319

Mon avis:


Sophie Delalande élève seule sa fille Hortense qui va bientôt fêter ses 3 ans
Mère dévouée et exclusive, elle couvre sa fille de câlins et de cadeaux. Mais son univers bascule le jour où son ex conjoint kidnappe sa fille. Malgré l'enquête et les avis de recherche, Hortense et son père ne seront jamais retrouvés.
Vingt ans plus tard, Sophie n'est plus qu'une ombre qui mène une existence solitaire. Un soir elle croise une jeune femme dans la rue. Elle en est persuadée, c'est Hortense. Elle va tout faire pour se rapprocher d'elle et entre les deux femmes se noue une relation ambiguë.

Ces derniers temps, il est impossible de ne pas rencontrer le nom de Jacques Expert. Son dernier roman "Le jour de ma mort" se vend comme des petits pains. J'étais curieuse de découvrir cet auteur que je n'avais jamais lu. C'est chose faite avec ce thriller découvert à la médiathèque.

Les chapitres sont courts, alternant avec les points de vue des protagonistes et les rapports d'enquête. Le rythme est soutenu, l'ambiance glauque à souhait. Le roman devient rapidement addictif. 
Les éléments de la relation mère-fille sont habilement distillés et deviennent de plus en plus troublants.  Le lecteur échafaude ses hypothèses rapidement démontées par les chapitres suivants. 
L'ensemble est mené d'une main de maître par l'auteur jusqu'à l'avant-dernière page.
Car malheureusement, le final n'est vraiment pas à la hauteur de tout le reste! Toute la tension, le suspense élaboré au fil des pages, retombent comme un soufflé à la lecture de l'épilogue.
Je n'ai rien contre les fins ouvertes mais il manque quelques clés pour donner à l'ensemble de la crédibilité. Toutes les données exposées dans les chapitres précédents sont effacées et je suis restée perplexe avec tout un tas de questions (et pas des moindres) sans réponses.

C'est dommage car j'ai trouvé l'analyse de cette relation maternelle toxique très intéressante et rien que pour ça, je vous encourage à vous plonger dans ce thriller efficace. Et si vous avez trouvé quelques réponses qui ont pu m'échapper, n'hésitez pas à me les partager!
Bonne lecture.



jeudi 6 juin 2019

La poursuite du bonheur - Douglas Kennedy



Quelques infos:


Édition: Pocket
Date de parution: 2004
Pages: 774

Mon avis:


A l'enterrement de sa mère, Kate rencontre une dame âgée, élégante, qui lui raconte son histoire et celle de ses parents dans le New-York des années 50.

J'ai enchaîné les déceptions pendant cette lecture. Déjà, je souhaitais lire une histoire sur la période sombre du maccarthisme. Ce livre fait plus de 700 pages, les premières menaces qui planent sur les personnages n'apparaissent qu'à la page 480. Et ces 480 pages m'ont paru très longues. Cela aurait pu passer si j'avais réussi à apprécier les personnages. Mais impossible de m'identifier ou d'éprouver la moindre empathie pour eux. Je suis restée en dehors de leurs problèmes, leurs émotions qu'ils ont tendance à résoudre à coup de whisky. Leur rapport à l'argent m'a également dérangée, tout une page sur l'aménagement d'un appartement dont la cuisine a coûté tant de dollars, le canapé autant ainsi que la lampe de chevet et le napperon qui va avec... Je me serais cru dans un catalogue IKEA. C'est d'un ennui...
La romance m'a laissée de marbre. L'histoire de l'homme qui se satisfait d'une relation adultérine et de sa femme qui attend sagement à la maison ne parvient qu'à une accumulation de poncifs et n'a en rien fait vibrer ma petite fleur bleue.
Je ne sais pas trop quoi retenir de cette lecture que j'ai réussi à finir car, en déplacement, je n'avais que ça à lire. Peut être n'est ce pas le meilleur Douglas Kennedy que j'ai choisi.



mercredi 5 juin 2019

Les bracassées- Marie-Sabine Roger


Quelques infos:


Édition: Le Rouergue
Date de parution: août 2018
Pages: 315

Mon avis


Fleur vit seule dans son appartement avec son chien Mylord. Agoraphobe, elle ne sort que pour ses séances avec son thérapeute et étouffe ses angoisses à coup de Zenocalm et Placidon.
Harmonie est une jeune fille atteinte du syndrome de Gilles de la Tourette. Ses gestes désordonnés et sa coprolalie suscitent au mieux le rire, au pire la peur. 
Ces deux femmes vont se rencontrer et nouer une amitié improbable auquel se rattachera toute une galerie de personnages inclassables, eux aussi mis au ban de la société à cause de leur singularité.

"Toutes les deux nous sommes d'une espèce en voie de progression, l'espèce de celles et ceux qui nichent dans des caches, se terrent dans des trous de hobbit, vivent dans des bocaux étiquetés Obésité morbide Syndrome de Machin ou Maladie de Truc. Nous sommes de l'espèce des paumés inclassables condamnés pour survivre à se faire oublier."

Marie-Sabine Roger et moi, c'est une grande histoire. Depuis ma rencontre avec La tête en friche, je suis tombée sous le charme de sa plume et j'ai dévoré tous ses romans. Je me suis donc plongée avec bonheur dans son dernier livre.
Et là aïe! Ça coince, la magie n'opère plus. De quel côté vient cette faiblesse: de moi? D'elle? Je ne peux me résoudre à abandonner alors je persiste. Et soudain, la voilà la petite étincelle. Je retrouve ses mots magiques, son sens inégalé de la formule...et je commence à comprendre tout le travail stylistique que Marie-Sabine Roger a effectué pour que l'on s'imprègne des personnages. Certes il faut s'habituer au monologue barbant de Fleur, aux insultes d'Harmonie mais plus elles avancent et créent des liens avec le monde qui les entoure, plus elles se débarrassent de leurs tics et leurs manies. Au final, ce qui me dérangeait quand j'ai entamé ma lecture m'est apparu alors comme l'une des forces de ce roman car il met en évidence toute la progression des personnages.

C'est une belle leçon de tolérance que nous livre là Marie-Sabine Roger. Elle aborde avec humour et légèreté des sujets graves et elle éclaire d'un regard optimiste des situations désespérées.

"On ne peut voir le monde qu'avec ses propres yeux mais on peut distinguer le beau dans le disgracieux, le sublime dans le grotesque, l'immense dans le minuscule. Ne voir que si nous dérange c'est du temps perdu sur le bonheur."

Toute l'essence de ce livre est résumé dans cette phrase. C'est une histoire qui redonne foi en le genre humain et offre un remède efficace et nécessaire contre l'intolérance.



jeudi 16 mai 2019

Les feuilles mortes - Thomas H. Cook



Quelques infos:

Édition: Gallimard Série Noire
Date de parution: 2008
Pages: 275

Mon avis:


Eric Moore mène une vie sans histoire auprès de sa femme Meredith et de son fils Keith âgé de 15 ans. Jusqu'au jour où la fille de ses voisins, Amy 8 ans, disparaît alors que son fils en avait la garde le temps d'une soirée. Très vite les soupçons se portent sur Keith, adolescent renfermé et taciturne, qui semble cacher bien des secrets. Eric se sent tiraillé entre sa position de père, prêt à tout pour protéger son fils et ses doutes sur son innocence.

Je ne suis pas vraiment fan du genre thriller, mais dès que le nom de Thomas H. Cook apparaît, c'est en toute confiance que je me plonge dans un de ses romans. Là encore, je n'ai pas été déçue. Comme à son habitude, le récit est raconté après les événements dramatiques qu'ont connu la famille Moore. Petit à petit, l'auteur tisse la toile de l'intrigue, les pièces du puzzle s'assemblent jusqu'à la révélation finale. L'originalité du récit vient du fait que l'histoire est racontée par le père du principal suspect. On assiste alors aux dommages collatéraux de cette tragique histoire de disparition. 

"Le soupçon est un acide. Il ronge tout ce qu'il touche. Il s'attaque à la surface des choses en y laissant une marque indélébile."

L'intérêt du roman se n'est pas l'enquête en elle même qui est d'ailleurs conclue assez rapidement mais du cheminement que fait Eric qui se met à douter de ses proches. Ses doutes et ses sentiments sont mis en avant. Comment concevoir que son enfant ait pu commettre l'irréparable? La mécanique bien huilée de sa famille parfaite et sans histoire s'enraye. Les non dits et les reproches apparaissent. Son propre passé resurgit et le conduit à une spirale autodestructrice et paranoïaque. 
Il y a peu d'action dans ce roman mais on y trouve une analyse approfondie des liens père/fils et du soupçon qui insidieusement ronge le cocon familial. 

"Qu'est ce que l'amour filial sinon aimer des gens que l'on n'aimerait pas?"

C'est un roman très sombre. Le mythe de la famille parfaite en prend un sacré coup. Le doute, omniprésent, rend l'atmosphère pesante.  Malgré les longs moments d'introspection du personnage principal, l'ensemble se lit sans ennui et s'avère même assez addictif. Comme Eric, le lecteur aimerait arriver à se positionner. Comme d'habitude, l'auteur flirte avec les genres: roman noir? Polar? Thriller? Roman psychologique? Un peu tout à la fois, ce roman se révèle être encore un coup de maître!





mercredi 15 mai 2019

L'atelier des miracles - Valérie Tong Cuong



Quelques infos:


Édition: JC Lattès
Date de parution: 2013
Pages: 264


Mon avis:


Millie est une jeune fille solitaire qui échappe de peu à l'incendie de son immeuble. Espérant se débarrasser d'un lourd secret en endossant une nouvelle identité, elle feint l'amnésie. 
Mariette ne supporte plus son métier de professeur d'histoire-géo. Poussée à bout par ses élèves, elle plonge dans la névrose. 
Monsieur Mike, déserteur de l'armée, trouve refuge dans la rue jusqu'au jour où il se fait passer à tabac. 
Ses trois accidentés de la vie vont croiser la route de Jean, une âme charitable qui tient l'Atelier des Miracles, une association qui aide ceux dans le besoin à remettre le pied à l'étrier.
La première partie est consacrée au parcours chaotique des trois protagonistes, on suit leurs errances jusqu'à l'arrivée providentielle de Jean où ils entament leur processus de résilience. Les portraits sont bien dessinés, l'empathie pour ces âmes blessées immédiate. Puis, curieusement, le roman prend une autre tournure, pour s’intéresser à la personnalité énigmatique de Jean et de sa générosité finalement pas si désintéressée. Virage plus ou moins bien négocié. Continuer sur la lancée de la première partie prenait le risque de faire tomber ce roman dans une forme de mièvrerie. Mais la reconstruction des personnages est bien trop rapide pour être crédible, et la personnalité trouble de Jean ne m'a pas convaincue.
La lecture n'a pas été désagréable en soi mais je n'ai pas vraiment été convaincue par cette histoire un peu surréaliste dont les thèmes de l'acceptation de soi, la résilience ou de la maîtrise de son destin n'ont pas été assez approfondis à mon goût.




samedi 11 mai 2019

Un paradis - Keyi SHENG



Quelques infos:


Édition: Philippe Picquier
Date de parution: Septembre 2018
Pages: 176

Mon avis:


A Shanghai, une jeune femme simple d'esprit décrit de l'intérieur la vie de femmes enfermées dans une clinique pour mères porteuses illicite qui tient autant du camp militaire que de la maison close. Face à la violence des hommes, elle montre la solidarité entre les prisonnières, désignées par des numéros mais qui s'attribuent entre elles des noms de fruits.

Le sujet avait tout pour me plaire et les critiques font l'éloge d'un texte décrit comme poétique. Mais voilà, la narratrice est une jeune fille déficiente et c'est un beau bordel dans sa tête. La narration passe du coq à l'âne, impossible de savoir si elle parle du présent ou du passé ou si ce qui se passe est réel ou le fruit de son imagination. Bien que le roman ait été traduit, pour moi c'était du chinois. J'ai abandonné au bout de 50 pages... J'ai un peu honte quand je pense qu'il n'en comporte que 176! Mais quand la mayonnaise ne prend pas, je préfère passer à autre chose.




lundi 6 mai 2019

Anthracite - Cédric Gras



Quelques infos:


Édition: Folio
Date de parution: 2016
Pages: 288

Mon avis:


Depuis l'hiver 2014 où le gouvernement a été renversé par la révolution de Maïdan, le climat est tendu en Ukraine entre les pro-russes et les pro-ukrainiens. Vladlen, le chef d'orchestre de l'Opéra de Donetsk, regarde ce tumulte de loin, plus préoccupé par son histoire adultérine avec Essénia que par le climat politique de son pays. Le jour où il joue (par mégarde?!) l'hymne ukrainien devant un public de séparatistes, le voilà pourchassé dans les rues de Donetsk. Contraint de fuir la région, il rejoint son ami d'enfance, Emile, un ingénieur travaillant dans les mines à charbon du coin. 
A bord d'une Volga hors d'âge, les deux amis partent à travers leur Donbass natal ravagé par la guerre, rejoindre leur femme ou leur maîtresse.

J'ai découvert Cédric Gras grâce à son livre La mer des cosmonautes lu en Février 2017. J'avais adoré et c'est en confiance, découvrant ce titre dans les étagères de mon libraire préféré que je me suis plongé dans ce roman.
J'ai trouvé ce livre remarquable à plusieurs points de vue.
L'auteur dresse le tableau d'une région ravagée par un conflit, vu par les yeux de Vladlen et Émile. Nos deux protagonistes se retrouvent embarqués dans une histoire dont l'enjeu les dépasse. Les volte-face de nos deux antihéros au gré des barrages tenus soit par les révolutionnaires soit par les séparatistes donnent lieu à des scènes qui oscillent en permanence entre burlesque et tragédie. C'est avec un brin de cynisme que Cédric Gras nous fait partager cet épisode de l'histoire moderne qui s'est passé à nos portes et dont les enjeux dépassent les frontières de l'Ukraine même. L'histoire de Vladlen et d'Émile ne sert que de prétexte à nous informer sur les forces en présence et la confusion qu'a générée ce conflit. Le tout sans aucun parti pris. 

"Tant de jeunes hommes étaient déjà morts dans les steppes pour une causse aussi inexpliquée que les trous noirs de l'univers. Que graverait-on sur leurs tombes? -L'absurde reconnaissant"? Il ne restait plus qu'à prier."

Le seul reproche: un petit rappel historique ou même une carte m'aurait aidé dans ma lecture. J'avoue avoir peiné les 50 premières pages à comprendre qui était qui. 

De l'Histoire, de l'humour et même un peu de poésie dans les descriptions de ces steppes modelées par l'industrie minière et métallurgique. L'auteur maîtrise le sujet et je me suis laissée embarquée par ce roman.



dimanche 28 avril 2019

Filles de la mer - Mary Lynn Bracht



Quelques infos:


Édition: Robert Laffont
Pages: 432
Date de parution: Février 2018


Mon avis:


       Sur l'île de Jeju, au sud de la Corée, Hana 16 ans est une haenyeo, tout comme l'est sa mère et tout comme le sera sa soeur Emi, âgée de 9 ans. Ce sont des pêcheuses en eaux profondes et leur activité permet de nourrir la famille. Nous sommes en 1943. La Corée vit sous la domination japonaise depuis 1910. Un jour, Hana aperçoit un soldat japonais qui se dirige vers sa sœur. Pour la protéger, elle se laisse enlever à sa place et est envoyée jusqu'en Mandchourie où elle devient une femme de réconfort. Durant d'interminables journées, avec d'autres coréennes, elle est violée par les soldats japonais.
       Le récit alterne avec l'époque moderne où nous retrouvons Emi maintenant âgée de 77 ans. Depuis trois ans, elle participe aux manifestations à Séoul réclamant la reconnaissance par le Japon des crimes perpétrées contre ces femmes. Elle garde l'espoir de retrouver un jour sa sœur qui s'est sacrifiée pour elle.
      C'est un livre difficile, qui met en lumière un pan peu connu de l'histoire mondiale: les guerres d'Asie qui ont vu s'affronter le Japon, la Chine et la Corée du début du 20e siècle jusqu'en 1953. Longtemps restées silencieuses, ce n'est que récemment que ces femmes de réconfort ont osé prendre la parole et ont témoigné des atrocités qu'elles ont vécues. 
Hana est séparée de sa famille, de sa terre, perd son identité, sa culture et sait que tout retour est impossible car elle sera à jamais marquée du sceau de la honte d'être devenue une esclave sexuelle. Malgré tout, portée par une force de vie exceptionnelle, elle luttera pour sa survie dans des conditions atroces.
Emi a vécu toute sa vie sous le poids de la culpabilité. Elle cherche aujourd'hui à affronter son passé et faire le deuil de cette sœur disparue. 

      C'est un livre brutal et dérangeant. De nombreux passages difficiles ont rendu ma lecture pénible. Malgré tout, ce livre n'est pas dénué d'espoir. Ces femmes font preuve d'une force et d'un courage remarquables et résistent pour ne pas sombrer. Outre ces faits historique, j'ai découvert la culture coréenne et notamment celle des haenyeo, cette communauté de femmes fondée sur la connaissance de la mer et de la pêche en apnée. C'est cette identité qui permet à Hana de tenir, de ne pas oublier qui elle est. C'est également auprès des haenyeo, alors que sa famille a été brisée par la guerre, qu'Emi trouve du soutien.

       C'est un livre nécessaire, pour connaître et ne pas oublier, en mémoire de toutes ces femmes qui ont subi et subissent encore les horreurs de la guerre.




dimanche 21 avril 2019

Toutes les histoires d'amour du monde - Baptiste Beaulieu



Quelques infos:


Édition: Mazarine
Date de parution: Octobre 2018
Pages: 478

Mon avis:


Moïse est mort à plus de 90 ans. Son fils Denis trouve dans une vieille malle trois carnets dans lesquelles, consciencieusement, Moïse écrit des lettres à une inconnue, Anne-Lise, dont personne dans la famille n'a jamais entendu parler. Il faut dire qu'il n'était pas vraiment bavard Moïse, plutôt du genre taiseux, froid et distant, même avec ses proches.

"Parfois, Moïse nous disait bonjour, mais se souciait-il vraiment de la qualité de nos journées? Absorbé dans ses pensées, il disait des phrases comme:" Je vais sortir le chien". Puis il partait, mais il rentrait, il avait oublié le chien. Il repartait, et c'était la balade, puis c'était le fauteuil, et c'était sa musique. Comme tu habitais tout seul ton corps, grand-père, et tout seul ton fauteuil, tu habitais tout seul avec nous."

Bouleversé par cette découverte, Denis fait un malaise cardiaque. C'est son fils Jean qui prend alors le relais et part sur les traces d'Anne-Lise. Curieusement, entre eux aussi, la communication passe difficilement et ils trouveront dans cette quête un moyen d'éviter que l'histoire familiale ne se répète et d'apaiser leur relation.

La couverture est magnifique, le titre alléchant et les critiques élogieuses. Ce livre avait tout pour m'attirer. Le début a été difficile, il m'a fallu arriver à un bon tiers du livre pour réellement me plonger dans l'histoire. Je crois que je suis passée à côté de la partie contemporaine et notamment de la façon dont Jean essaye d'apaiser les relations avec son paternel. Il lui raconte des histoires d'amour inventées, lui fait croire qu'il a retrouvé les descendants des personnes que Moïse a pu croiser et le but de ces mensonges m'a complètement échappé.

En revanche, les lettres de Moïse sont poignantes. Au crépuscule de sa vie, il confie à Anne-Lise l'homme qu'il a été, depuis sa naissance. Chaque année, à la même date, il lui écrit une lettre où il s'expose, sans fard, ses doutes, ses faiblesses, ses drames et ses bonheurs. Il se révèle être un homme doux et sensible, bien loin de la carapace dure et infranchissable qu'il montrait à ses proches, notamment à son fils Denis. 

"Mais les regrets, oh, les regrets... Toi qui me lis, souviens-toi des tiens, et tu seras d'accord: jamais ils ne disparaissent, les regrets. Ils enflent avec les années, ils vous dévorent le soir, ils teintent de tristesse le plus joyeux des rires et tournent à l'amer le plus sucré des mets. C'est là leur grand pouvoir sur nous."

C'est évidemment la seconde guerre mondiale qui marque un tournant dans sa vie. C'est là que l'histoire de Moïse m'a véritablement emporté: sa vie de prisonnier de guerre, les relations qu'il a pu nouer avec les allemands, les différences sociales effacées "où la Guerre rendait tous les hommes égaux". 

Ce roman s'est finalement révélé être d'une profonde richesse, il y est question d'amour, des liens familiaux, de regrets, de souvenirs...

"On meurt vraiment quand tous les gens qui nous ont aimé meurent aussi, où quand il n'y a plus de souvenirs."

En s'appropriant ces lettres, Baptiste Beaulieu nous offre ici une belle leçon de vie. Suivant les conseils de Moïse, il s'évertue à renouer les liens familiaux et finalement, même s'il est question de guerre, de secrets familiaux ou de deuils,  c'est un roman empli d'optimisme et d'espoir, qui appelle chaque lecteur à aimer, espérer et se souvenir. Et qu'il existe une façon de ne pas reproduire indéfiniment le schéma familial.

"Je voudrais que la personne qui lit ces lignes et a cette chance infinie d'avoir encore son grand-père, sa grand-mère, l'appelle et lui dise -Raconte moi maintenant tout ce que tu n'as jamais dit. Après il sera trop tard-"




NB: Ce livre est d'autant plus touchant qu'il s'agit d'un roman autobiographique. L'auteur est réellement à la recherche d'Anne-Lise Schmidt, sa tante âgée aujourd'hui de 75 ans. Puisse-t-il un jour la retrouver et lui remettre ces carnets...


jeudi 11 avril 2019

Le dernier gardien d'Ellis Island - Gaëlle Josse



Quelques infos:


Édition: J'ai lu
Pages: 188
Date de parution: 2014

Mon avis:


Nous sommes en 1954. Depuis 1892, Ellis Island, petite île située à l'embouchure de l'Hudson, est le lieu de passage obligé pour les candidats à l'immigration. 12 millions d'hommes, de femmes et d'enfants sont passés à l'inspection, entre les mains d'infirmières, de médecin ou de fonctionnaires plus ou moins zélés, plus ou moins honnêtes. Les faibles, les malades, les déficients mentaux étaient rejetés sans appel et renvoyés dans leur pays. 
A quelques jours de la fermeture, le dernier gardien d'Ellis Island John Mitchell éprouve le besoin irrépressible de raconter ses mémoires sur quelques feuilles de papier. Dans ce lieu unique personnage à part entière, John Mitchell est hanté par toutes ces vies croisées, ces hommes et ces femmes qui se sont vus examinés, questionnés, jugés...Ces destins bouleversés par un tampon sur un un papier leur donnant la nationalité américaine ou leur billet de retour au pays. 

"J'ai parfois l'impression que l'univers entier s'est rétréci pour moi au périmètre de cette île. L'île de l'espoir et des larmes. Le lieu du miracle, broyeur et régénérateur à la fois, qui transformait le paysan irlandais, le berger calabrais, l'ouvrier allemand, le rabbin polonais ou l'employé hongrois en citoyen américain après l'avoir dépouillé de sa nationalité. Il me semble qu'ils sont tous encore là, comme une foule de fantômes flottant autour de moi."

Au crépuscule de sa vie, John Mitchell soulage sa conscience d'employé méticuleux, cette façade cachant ses faiblesses d'homme, ses deuils, ses regrets. A l'image de cette île, il s'est isolé et se sent hors du temps. C'est la touchante confession d'un homme confronté à la rigidité de l'administration américaine et aux destins de ces anonymes qui ont fuit la misère et espéré un avenir meilleur.

Dans ce court roman à l'écriture fine et sensible, l'auteur a su nous dépeindre toute la violence, la tristesse, la mélancolie qui règnent dans ce lieu. Elle nous parle d'exil, d'errance, de choix, de l'angoisse et des espoirs des candidats à l'immigration. 
C'est un livre bouleversant, dont la lecture est lourde de sens à notre époque.




samedi 6 avril 2019

Ils vont tuer Robert Kennedy - Marc Dugain



Quelques infos:


Édition: Gallimard
Date de parution: Août 2017
Pages: 399

Mon avis:


Au Canada, un professeur d'histoire contemporaine à l'université rédige une thèse sur l'assassinat des frères Kennedy. Il est persuadé que la mort du président et du sénateur sont liées à celle de ses parents. Mêlant les deux enquêtes, celle historique, l'autre fictive, ce livre nous emmène dans les coulisses de la politique américaine.
Ce roman m'a happé dès les premières pages. Fascinée par le mystère entourant la mort de John Kennedy, j'ai dévoré les premiers chapitres charmée par l'écriture précise. Le texte est dense, comme un épais brouillard à traverser sans jamais arriver à trouver la vérité. L''écriture se teinte de cynisme, de mélancolie, de fatalisme, à l'image de Robert Kennedy qui se présente aux primaires de 1968 comme on monte à l'échafaud.

"Le sens de l'existence lui fait profondément défaut. S'il avait poussé l'honnêteté vis-à-vis de lui- même à son comble, il aurait tout plaqué, laissé derrière lui cet héritage maudit, tout cet argent sale qui a fait de lui cet aristocrate irlandais désabusé, il se serait détaché de cette vie matérielle, objet de souffrances infinies, il se serait retiré de ce monde qui doit sa violence à son matérialisme acharné et où il n'est question pour chacun que d'augmenter sa part d'un gâteau supposé croître indéfiniment. L'absurdité du monde le torture, mais pas assez pour qu'il en tire des enseignements définitifs."

De fait, l'auteur démontre ici que la mort de John et de Robert sont intimement liées. La politique américaine en prend pour son grade, les valeurs de la société également. 
La qualité de l'écriture, l'érudition de l'auteur rend la démonstration convaincante même si elle manque malheureusement de références et prend même parfois des accents complotistes. Certaines phrases telles que "On peut s'imaginer que...."  font  parfois perdre de la crédibilité. Mais il s'agit d'un roman, pas d'un essai, la révélation finale sur le professeur explique peut être les invraisemblances.Mais surtout Marc Dugain connaît bien son sujet ayant abordé dans de nombreux romans les rouages de la politique américaine. 
Au final, cette immersion dans cette Amérique où l'attentat contre les personnalités était devenu un sport national est fascinante. Les conséquences de ces deux assassinats sont internationales. C'est sur ces bases malsaines que s'est construit le monde politique d'aujourd'hui.
Pas vraiment rassurant, voire même un peu déprimant. 




jeudi 28 mars 2019

La libraire de la place aux herbes - Eric de Kermel



Quelques infos:


Édition: Eyrolles
Date de parution: 2017
Pages: 213

Mon avis:


Nathalie, professeur de littérature, choisit de reprendre une librairie à Uzès, petite ville du Gard où elle avait l'habitude de passer ses vacances avec famille et mari. Un vrai changement de vie pour cette parisienne qui prend son nouveau travail très à cœur au point de devenir la confidente de ses clients. .
Chaque chapitre est consacré à la rencontre avec l'un d'entre eux. Il y a Cloé jeune fille issue d'une famille guindée qui tente de prendre son envol, Bastien qui part à la recherche de son père ou Leila qui est enceinte et n'ose pas en parler à son mari. En véritable bonne fée, elle les aide, à travers les livres, à résoudre leurs conflits intérieurs. 

"Dis moi ce que tu lis, je te dirai qui tu es."

Avec ce sous-titre accrocheur et sa jolie couverture, ce livre a attiré mon regard. Malheureusement, la sauce n'a pas vraiment pris. La galerie de personnage ne m'a pas convaincue et frôle la caricature. Les dialogues sonnent creux, trop simplistes. Nathalie ne rencontre aucune difficulté dans sa nouvelle profession et je doute que la vie d'un(e) soit aussi simple que cela. Comme par magie, les problèmes se résolvent en un claquement de doigts (mention spéciale au soldat qui sort du coma grâce à notre formidable libraire! ) C'est trop, l'ensemble manque de crédibilité englué dans un trop plein de bons sentiments.
Il y a malgré tout un intérêt à lire ce roman: c'est un livre qui parle de livres. Il y a de nombreux titres référencés qui donnent envie de les découvrir. Le rapport entre le lecteur et l'objet "livre" est plusieurs fois évoqué avec de jolies métaphores qui ont retenues mon attention et m'ont aidé à aller au terme de cette lecture.

"Je crois à la très grande importance de la sensualité de l'objet. Le lecteur qui va passer plusieurs heures au contact du papier doit avoir du plaisir; celui de la page que l'on frotte entre deux doigts avant de la tourner, de la couverture que l'on caresse comme de la soie, de la tranche que l'on peut poser devant ses lèvres sans se couper au fil des feuilles. On doit pouvoir se coucher nu sur du papier comme dans les draps d'un lit qui ont séché au vent et au soleil!"

Ces jolies réflexions ne s'accompagnent pas d'une fiction plus réaliste sur la vie d'une librairie et ne suffisent pas à rendre ce roman réellement intéressant. Dommage!


mardi 19 mars 2019

Le chagrin des vivants - Anna Hope



Quelques infos:


Édition: Gallimard
Date de parution: 2016
Pages: 384

Mon avis:


Londres, en novembre 1920. Deux ans après la signature de l'Armistice, l'Angleterre attend l'arrivé du Soldat inconnu dont la dépouille a été rapatriée depuis la France pour une cérémonie en grande pompe. Hommage nécessaire pour la nation toute entière qui est encore sous le choc des ravages provoqués par la grande guerre et pour laquelle elle a payé un lourd tribut. Mais en dessous de ce drame national, se cachent des drames personnels souvent secrets, cachés derrière l'Histoire. 
Il y a Ada, une mère qui pleure son fils. Sans corps autour duquel se recueillir, elle doute de sa mort et croit le voir partout.
Il y a Evelyn, qui a perdu son fiancé, qui n'est que colère et amertume.
Et enfin, Hettie, 19 ans, dont le frère est revenu de la guerre, tel un fantôme. C'est sur ses frêles épaules que repose désormais la responsabilité de faire vivre la famille. Elle est jeune, aimerait plus d'insouciance et de légèreté. Elle aspire à vivre tout simplement.

"Pourquoi ne peut-il pas passer à autre chose?
Pas seulement lui. Tous autant qu'ils sont. Tous les anciens soldats qui font la manche dans la rue, une planche accrochée autour du cou. Tous vous rappellent un événement que vous voudriez oublier. Ça a suffisamment duré. Elle a grandi sous cette ombre pareille à une grand chose tapie qui lessive la vie de toute couleur et toute joie. (...) La guerre est terminée, pourquoi ne peuvent-ils donc pas tous passer à autre chose, bon sang?"

Il y a aussi les hommes. Ed, revenu de la guerre indemne de blessures physiques et qui panse ses blessures morales à coup de whisky. Rowan ancien soldat qui tente de faire vivre sa famille en vendant des babioles de maison en maison....

Tous ces personnages ont un point commun: il sont rongés par la culpabilité. Celle de n'avoir pas pu protéger ceux qu'ils aimaient, celle d'être vivant et de vouloir vivre ou celle d'avoir survécu. 

"Et quoi qu'on puisse en penser ou en dire, l'Angleterre n'a pas gagné cette guerre. Et l'Allemagne ne l'aurait pas gagnée non plus. (...) C'est la guerre qui gagne. Et elle continue à gagner, encore et toujours."

Le récit s'étale sur les cinq jours qui précédent la cérémonie. Cinq journées décisives pour les personnages pendant lesquelles ils vont tenter de comprendre l'inconcevable et de se débarrasser de cette culpabilité, grâce à la parole qui libère, en exposant leur vérité. "Ne rien se dire qui ne soit pas franc."  Tous y trouveront une forme de consolation et de pardon. 

J'ai lu ce roman comme on se prend une grosse claque. C'est une oeuvre magnifique pour ne pas dire magistrale qui démontre à quel point il peut être difficile d'être le survivant. C'est un bel hommage à ceux qui ont combattu mais aussi à celles, qui sont restées à l'arrière; des femmes, des sœurs, des mères, qui, sans pourtant avoir participé aux combats, sont sorties de cette guerre tout aussi déglinguées. Et pourtant malgré leur doute, leur traumatisme, tous ces survivants ont trouvé suffisamment de force en eux pour rebondir et ont contribué à la renaissance de la nation,  Cette cérémonie du Soldat inconnu est le symbole d'un pays qui panse ses blessures individuelles et collectives autour d'une même commémoration où chacun cristallise son propre deuil.
Le fil conducteur, l'imbrication des histoires, tout est maîtrisé de bout en bout. Les tourments des personnages sont particulièrement bien décrits et fouillés. Le tout porté par une écriture sublime, subtile qui arrive à exposer l'indicible avec cette douceur percutante qui laisse le lecteur bouche bée. 
Un livre étonnant de vérité qui fera partie des inoubliables.



jeudi 28 février 2019

La maison des hautes falaises - Karen Viggers



Quelques infos:


Édition: Le livre de poche
Date de parution: Mars 2017
Pages: 507

Mon avis:


Lex Henderson vient s'installer à Merrigan, une ville perdue sur la côte est de l'Australie où il est venu se reconstruire après un divorce douloureux. 
Callista est native du coin mais reste en marge de la communauté. Elle aussi traîne ses casseroles. Artiste-peintre, elle vivote en vendant des toiles sans âme au marché de Merrigan. 
C'est là qu'ils se rencontrent,se rapprochent et se devinent dans leurs blessures respectives qu'ils tentent de dissimuler. Au milieu de cette nature sauvage où les journées sont rythmées par le bruit de l'océan, Lex et Callista entament un long processus de résilience et tenteront de faire de nouveau confiance en l'avenir.

La lecture de ce joli roman offre un dépaysement garanti. Sous les yeux de Lex et de Callista, la nature offre un merveilleux spectacle parfois apaisant, parfois destructeur. Tout est finement décrit: on entend l'océan, le chant des baleines, on sent les embruns et la force du vent.... L'auteur nous fait l'historique de la chasse à la baleine dont elle dénonce les conséquences sans juger les motivations des baleiniers qui voulaient juste nourrir leur famille.

"Lex scrutait ces hommes et rien dans leurs visages ne lui expliquait leurs choix. C'étaient les traits d'hommes normaux. Des hommes qui luttaient pour survivre à une époque difficile. Ils ressemblaient à n'importe qui travaillant  au soleil avec une pelle, ramant sur un bateau, labourant un champ pour se faire de l'argent. Ils ressemblaient à des gens ordinaires qui avaient des familles, qui mangeaient, buvaient, transpiraient, travaillaient dur, craignaient, souffraient. Il aurait pu être n'importe lequel d'entre eux q'il avait vécu à leur époque, dans leur ville, dans leur situation. Aucun d'eux n'avaient l'air d'un démon. Ce n'était pas des assassins sanguinaires qui aimaient donner la mort. Mais des hommes qui faisaient leur boulot. Et un boulot sacrément difficile."

Karen Viggers nous emmène dans la vie de la petite communauté de Merrigan avec ses célébrités locales, ses événements incontournables mais surtout cette solidarité indispensable lorsque les éléments se déchaînent. 

J'ai eu un faible pour Lex, j'ai aimé le contact qu'il avait avec la nature, la façon dont il se remettait en cause et sa lente reconstruction au contact des éléments. Pour ce qui est de l'histoire d'amour, celle-ci m'est apparue secondaire, le jeu du chat et de la souris entre Lex et Callista a même fini par me lasser. 

J'en suis d'ailleurs amusée. J'ai trouvé dans ce livre des choses que je ne suis pas venue chercher: une belle galerie de personnages secondaires, une évocation sublime de la nature et des éléments et un troisième personnage principal auquel je ne m'attendais pas: la baleine qui est magnifiée dans ce récit. Ce roman m'a donc offert une belle surprise et je le recommande chaudement

"Il y a cette étrange idée que les baleines sont le symbole de tout ce qui est grandiose et beau sur terre. Tout ce qui est sauvage et libre. Je ne sais pas d'où ça vient. Cela n'a rien de rationnel. C'est peut-être parce qu'elles sont gigantesques, parce qu'on ne les voit pratiquement jamais. Et si, par bonheur, on les aperçoit, c'est toujours une rencontre incroyable..."



vendredi 22 février 2019

Le cœur converti - Stefan Hertmans



Quelques infos:


Édition: Gallimard
Date de parution: Août 2018
Pages: 368

Mon avis:


Au XIe siècle, à Rouen, Vigdis Adélais croise le regard de David Todros, venu étudier dans la yeshiva de Rouen. Cette jeune fille chrétienne, issue d'une riche famille Normande tombe amoureuse et choisit de se convertir au judaïsme pour les beaux yeux du jeune homme. Cet amour réprouvé par les parents de la jeune fille les oblige à fuir jusqu'à Narbonne, dans la famille de David. Poursuivi par des chevaliers normands payés par la famille de Vigdis, leur fuite se poursuivra jusqu'à Monieux, dans une communauté juive où ils connaîtront un peu de repos. Jusqu'en 1096 où le pape Urbain II appelle à une 1ère croisade jusqu'à Jérusalem. La vie de nos deux amoureux en sera à jamais bouleversée....

Voici un livre, à la construction inédite à mi-chemin entre le roman et la thèse. David et Vigdis ont réellement existé. Pour preuve, ce manuscrit trouvé dans une synagogue du Caire. Se basant sur ce témoignage, l'auteur calque ses pas sur ceux du couple et entreprend le même voyage, de Rouen jusqu'à Narbonne, puis Monieux.
Au départ j'ai été séduite par l'exercice, touchée par l'émotion ressentie par Stefan Hermans lorsqu'il se trouvait dans des lieux connus de David et Vigdis. Ces deux personnages étaient omniprésents, tels des fantômes venus raconter leur histoire. Mais rapidement, ces interventions récurrentes de l'auteur ont fini par me lasser, comme si son voyage était autant le sujet du roman que celui de la fuite éperdue de David et Vigdis.
De plus, l'auteur nous fait comprendre que les sources sont difficilement exploitables. S'il s'est autorisé à broder certains passages de l'histoire, à juste titre puisqu'il écrit un roman, il s'est limité pour d'autres, laissant le lecteur dans le flou, notamment en ce qui concerne le destin des enfants du couple.
Au fil du roman, le tragique destin des amoureux a fini par me miner et ces aller-retours entre fiction et réalité par me lasser.
Dommage car il faut reconnaître la qualité du travail de recherche de l'auteur, sa jolie écriture et ses connaissances sur le sujet.
Peut être suis-je trop conventionnelle et trop peu érudite pour en apprécier la réelle valeur....



lundi 18 février 2019

Le journal de Mary - Alexandra Echkenazi



Quelques infos:


Édition: Belfond
Date de parution: 
Pages: 288


Mon avis:


Qui a tué Mary Meyer? Cette femme de la haute société new-yorkaise a été le grand amour de Jack Kennedy. Elle a été assassinée un an après la mort de son amant, alors qu'elle n'a jamais caché ses doutes quant aux conclusions de la commission Warren. Selon ses proches, elle tenait un journal qui n'a jamais été retrouvé.

Alexandra Echkenazi écrit ici son journal fictif et dresse le portrait d'une femme moderne pour son époque, d'une femme amoureuse, d'une femme libre.

"Ils te diront que parce que tu es une femme, tu n'es pas capable de faire certaines choses. Ne les crois pas Mary. Jamais"

Cette immersion dans l'Amérique des années 60 est passionnante: l'émancipation de la femme, les tentatives d'apaisement dans les relations Est/Ouest, la fin de la ségrégation raciale.... On découvre ici le contexte dans lequel Kennedy a exercé son mandat, les décisions qu'il a du prendre dans un contexte international tendu et qui ne lui ont pas valu que des amis. Le style littéraire ne casse pas des briques, j'ai trouvé que l'histoire d'amour sonnait un peu creux, mais peut être est-ce un effet voulu par l'auteur. On lit un journal intime, pas d'un classique de la littérature. Bien que l'on connaisse le tragique destin de Mary, les pages se tournent facilement et le lecteur se laisse prendre au jeu de cette histoire d'amour. J'ai refermé ce livre avec un peu de frustration ne pouvant démêler le vrai du faux, les faits réels de ce qui est sorti de l'imagination de l'auteur. 

C'est un roman plaisant à lire qui ajoute une pierre au mystère entourant la mort de Kennedy.



lundi 11 février 2019

Toute la ville en parle - Fannie Flagg



Quelques infos:


Édition: Cherche Midi
Date de parution: Février 2019
Pages: 512


Mon avis:


"L'auteur de Beignets de tomates vertes nous conte, dans ce roman choral, l'histoire d'un petit village du Missouri, Elmwood Springs, depuis sa fondation en 1889 jusqu'à nos jours. Les années passent, les bonheurs et les drames se succèdent, la société et le monde se transforment, mais les humains, avec leurs plaisirs, leurs peurs, leurs croyances, leurs amours, ne changent guère. et c'est la même chose au cimetière puisque, loin de jouir d'un repos éternel, les défunts y continuent leurs existences, sous une forme particulière. Au fil des décès, ils voient ainsi arriver avec plaisir leurs proches et leurs descendants, qui leur donnent des nouvelles fraîches du village. Tout irait ainsi pour le mieux dans ce monde, et dans l'autre, si d'inexplicables disparitions ne venaient bouleverser la vie et la mort, de cette paisible petite communauté."

Voici un roman atypique, le personnage principal de l'histoire étant une ville, Elmwood Springs. Nous assistons à sa sa naissance, sa croissance, son évolution, sous l'influence des événements locaux, parfois mondiaux. C'est un peu déstabilisant, il y a pléthore de personnages, difficiles parfois de s'y retrouver. L'auteur a choisi de balayer large, l'histoire se déroule sur plus d'un siècle traité en 500 pages, impossible de s'intéresser en profondeur aux événements et aux personnages. Le livre se construit également autour de la vie (!) dans le cimetière d'Elmwood Springs. Les morts se retrouvent, s'aperçoivent qu'ils peuvent discuter entre eux et connaissent, débarrassés de leur enveloppe charnelle et de ses défaillance, une forme d'allégresse. C'est amusant, cela donne une note fantastique à l'histoire. Même si l'auteur dans la dernière page invite le lecteur à s'interroger, l'au-delà n'est pas le vrai sujet du livre.

Malgré ces petits défauts, l'auteur nous emmène dans cette histoire fantasque et fantastique et fait d'elle une chronique sociétale. Les personnages se succèdent, ils connaissent leurs heures de gloire, leur lot de drame et contribuent au développement d'un monde qui devient celui que nous connaissons. La fine plume de Fannie Flagg traite les sujets avec malice, humour même mais sait se faire plus grave parfois. Dans les dernières pages, c'est la nostalgie qui prédomine. 

" Norma était sûre d'être la seule Américaine dépourvue d'une adresse électronique. Elle avait pourtant tenté de garder le contact avec de vieilles relations, mais elles n'appelaient plus, elles non plus. Le téléphone était passé de mode. Lorsqu'on avait besoin de s'adresser au service clientèle d'une entreprise, il fallait utiliser l'Internet. Si on avait la chance de pouvoir parler avec quelqu'un, votre interlocuteur vous répondait depuis l'Inde avec un accent impossible.
Cette solitude était pesante. Il manquait à Norma la compagnie des voix d'antan, quelques personnes avec qui discuter du bon vieux temps, avec qui rire et parfois pleurer."

Cette rapidité avec laquelle Fannie Flagg a traité certains événements (les deux guerres mondiales notamment) prend ici finalement tout son sens: le monde tel qu'il a été bâti et voulu par nos ancêtres a changé à une vitesse étourdissante et c'est finalement avec un peu de tristesse que j'ai refermé le livre, me demandant si la vie au côté de Lordor et Katrina au 19e siècle n'était pas plus chaleureuse que celle du 21 siècle... *

"Dans une grande ville, il est toujours agréable d'entretenir de bonnes relations avec ses voisins, de se montrer cordial et, de temps en temps, de boire un verre avec eux. Dans les petites communautés agricoles du Missouri, les voisins représentaient beaucoup plus que cela. On pouvait en préférer certains, mais de toute façon, on dépendant d'eux pour sa propre survie."


C'est le troisième livre de Fannie Flagg que je découvre ici après La dernière réunion des filles de la station service et Miss Alabama et ses petits secrets. Même si ma préférence va toujours au premier, j'a trouvé ma lecture plaisante. C'est une jolie histoire racontée avec brio.

Livre reçu lors d'une opération Masse Critique. Je remercie le site Babelio et les éditions "Cherche Midi" pour cet envoi!




* La vie au 19e siècle OK, mais avec le micro-ondes et la péridurale quand même! ;)

mardi 22 janvier 2019

Une fois dans ma vie - Gilles Legardinier



Quelques infos:


Édition: J'ai lu
Date de parution: Octobre 2018
Pages: 480

Mon avis:


Eugénie, la cinquantaine, traîne sa déprime dans les coulisses du théâtre dont elle est la gardienne. Ses enfants sont partis, elle est à un tournant de sa vie et elle s'interroge sur ce qui la motive réellement. Autour d'elle gravitent Céline, la couturière, engluée dans une histoire avec un homme marié, Julienne, la chorégraphe qui s'est entichée de son garagiste et n'arrive pas à déclarer sa flamme, Victor son mari toujours prêt à faire quelques blagues... Afin de retrouver un élan à sa vie, Eugénie décide de s'occuper des autres et tâche, avec plus ou moins de réussite, de résoudre leurs problèmes.

C'est un livre qui m'a été offert à Noël et il me tenait à cœur de le terminer. Mais ça m'a coûté! J'ai vraiment trouvé cette lecture pénible. Indubitablement, je ne fais pas partie du public de Gilles Legardinier. Les situations vécues par les personnages se veulent drôles. Je les ai trouvées ridicules, comme cette scène affligeante où Céline réclame à son ex-mari les impayés de sa pension alimentaire. Elle est accompagnée des ses amies, qui, pour faire peur à l'indélicat, sont déguisées en vache et en cheval! 
Qui oserait se ridiculiser de la sorte? 
Pathétique et sans intérêt.